29/08/2015

November Nine: Zvi Stern, l'outsider de Tel-Aviv

Si la table finale du Main Event des WSOP qui se jouera en novembre comporte comme à l'accoutumée une majorité de joueurs professionnels, cette année un joueur amateur semble particulièrement attirer la curiosité de la communauté poker.


Les neufs finalistes 2015. Zvi Stern tout à gauche.


Second israélien de l'histoire à disputer la table finale du Main Event – après Amir Lehavot qui finit 3ème en 2013 – Zvi Stern se présentera à la table avec un palmarès des plus modestes, même pour un joueur amateur. 

Si son activité professionnelle reste indéfinie – ou secrète – le natif de Tel-Aviv semble bénéficier d'une capacité financière importante. En effet, ce dernier arpente régulièrement le globe pour y jouer des tournois de standing... sans grand succès. En tout et pour tout deux misérables places payées, obtenues l'une en 2008 sur un tournoi mineur des WSOP et l'autre au début de 2015 au High-Roller du PCA !


Zvi "Stalling Unabomber" Stern


Si l'Israélien a adopté à table le look "Unabomber" inspiré de Phil Laak (large capuche assortie de lunettes noires), c'est pour une toute autre raison qu'il s'est fait remarquer à partir du 7ème jour de compétition. 

Zvi Stern s'est en effet attiré les critiques des autres joueurs en prenant des temps de réflexion exagérément longs, dans le but non avoué de ralentir le jeu à table pour espérer bénéficier d'éliminations des joueurs aux autres tables.  Ce procédé, proscrit par la communauté, est connu sous le nom de stalling. Utilisé par quelques joueurs de poker en ligne, cette pratique est particulièrement rare en tournoi live, et assimilée à de la triche.

Déjà assuré de remporter au minimum 1 million de dollars, l’Israélien démarrera le tournoi en deuxième position avec 30 millions de jetons et une cote de 6/1 chez les bookmakers, très loin derrière le favori Joe McKeehen, large chip leader.

28/06/2015

Nouvel éclairage sur la fin du Cercle Concorde

Il ne reste plus que trois cercles de jeu ouverts en France alors qu'on en a compté jusqu'à dix-sept seulement à Paris. Ces établissements, aux statuts juridiques baroques, presque exclusivement gérés par des Corses, ont dans un premier temps bénéficié d'appuis politiques et judiciaires au plus haut niveau de la République avant que le pouvoir politique ne décide d'y mettre un terme de façon brutale. L'édifiant témoignage de François Gouge, ex-copropriétaire du Cercle Concorde à Paris, publié par La Manufacture de Livres, permet de mieux comprendre ce moment de l'histoire du poker en France.



Banquier suisse spécialisé dans l'évasion fiscale ("ce qui fait la réputation de la place financière suisse, c'est que nous ne volons pas – du moins pas trop – nos clients"), François Gouge raconte son histoire avec un détachement qui le rend crédible. Pourtant, tous les éléments du mauvais polar y figurent : banquiers qui sentent le soufre, industriels obsédés par l'argent, politiques véreux des deux côtés des Alpes, paradis fiscaux, France-Afrique, rétrocommissions, et pour finir grand banditisme corse et règlements de comptes à Marseille. Au fil de ce récit plein de surprises, on comprend comment le narrateur, par cupidité et naïveté, perd peu à peu le contrôle jusqu'à ce qu'un enchaînement inexorable de faits le conduisent à la case prison. 




Construit comme un interview, ce récit où l'on croise de véritables personnages de romans ("on reconnaît un escroc à ce qu'il prétend systématiquement être proche d'un homme politique - et c'est parfois vrai") jette une lumière crue sur cette caste qui mêle financiers, politiques et bandits. On comprend comment les rôles se brouillent, les responsabilités se diluent, pendant que les millions passent d'un compte à l'autre - en un éclair. 

Ceux qui ont fréquenté le Cercle Concorde en 2006 retrouveront l'ambiance très particulière de cet établissement, profondément bling-bling et mafieuse à la fois. Ce livre est précieux car il permet de comprendre pourquoi les Cercles, dans leur configuration de l'époque, étaient voués à disparaître. 

Banquier: Un suisse dans le grand banditisme
François Rouge / Entretiens avec Ian Hamel
La Manufacture de Livres - 19,90€

28/03/2015

Wang Jianlin ressuscite le projet Eurovegas !

Nous annoncions sur ce blog en janvier 2014 l'abandon définitif du projet Eurovegas, énième version du serpent de mer qui vise à construire en Espagne le « Las Vegas européen ». Charlton Adelson, magnat de l'immobilier américain décidait en effet de jeter l'éponge devant les difficultés législatives, sociales et des perspectives de retour sur investissement jugées décevantes. Le projet pourrait donc une nouvelle fois renaître de ses cendres, en s'appuyant encore sur investisseur fantasque, étranger et milliardaire. Il s'agit cette fois de Wang Jianlin, qui est tout simplement l'homme le plus riche de Chine, avec une fortune estimée à plus de 16 milliards de dollars.

La première fortune chinoise se mettrait-elle au flamenco ?

Ex-soldat de l'Armée populaire de libération et membre du Parti Communiste chinois, Wang est depuis 1988 le propriétaire du conglomérat Dalian Wanda Group, spécialisé dans les hôtels et les centres commerciaux. 

Si des contacts officieux avaient été initiés l'an dernier entre le secrétaire d'état au commerce Jaime Garcia-Legaz et les hommes de confiance de Wang, les choses se sont accélérées en fin d'année avec une rencontre entre Wang et le premier ministre Mariano Rajoy. 

Nouveau propriétaire pour 256 millions d'euros de l'Edificio Espana, construction historique de Madrid située place d'Espagne, Wang est passé à l'offensive en début d'année sur le projet Eurovegas, promettant un investissement de 3 milliards d'euros et assurant que la balle était à présent « dans le camp de l'état espagnol ».

L'Edificio Espana, passé sous pavillon chinois en 2014

Si ce projet est bien plus modeste que celui initialement évoqué par Adelson avant de faire machine arrière, les liens entre Wang et l'Espagne laissent présager d'une issue plus prometteuse. En effet, ce dernier vient de finaliser l'achat de 20% du capital du club de football de l'Atlético Madrid, champion d'Espagne en titre.

04/01/2015

David Einhorn all-in contre les finances publiques françaises

Il y a quelques semaines, un américain faisant autorité dans les milieux financiers, a pris la parole pour dresser un tableau particulièrement sombre de l'économie française et plus encore de ses perspectives à court terme. 

 
 David Einhorn, côté business

David Einhorn, patron de hedge fund américain, est connu par exemple pour avoir prédit l'effondrement de la banque Lehman Brothers en novembre 2007, bien avant la crise des subprimes et la soudaine faillite de la banque aux 26.000 salariés le 15 septembre 2008. Par ailleurs, son fond, Greenlight Capital, aurait généré 20% de rentabilité à ses clients depuis sa création.

Ce renard de la finance n'est pas un inconnu pour les amateurs de poker. Engagé au Main Event des World Series of Poker 2006, il termina 18ème sur un total record de 8.773 inscrits encaissant au passage $659,730... somme qu'il s'empressa de reverser à une association caritative.

Einhorn côté poker, version 2006

En 2012, il fut l'un des 48 participants au fameux tournoi "Big One for One Drop" à un million de dollars des WSOP, qu'il finit 3ème, ajoutant $4,352,000 à ses gains en tournoi, vite reversés à diverses charities.

Einhorn (centre), posant lors de la TF du One Drop (WSOP 2012)

Il est à espérer pour le futur de l'économie française que le milliardaire de 47 ans sera moins clairvoyant cette fois qu'il l'a été par le passé, dans ses affaires comme au poker.

22/11/2014

Fin de partie pour le Cercle Cadet et le Nîmes Olympique ?

Le 20 novembre 2014, Serge Kasparian, principal actionnaire du club de football Nîmes Olympique aurait avoué au moins trois tentatives de trucage de matches de ligue 2 au printemps 2014. Mis en examen pour «corruption active et passive de personnes dans le cadre de manifestations sportives», il fait encourir à son club pas moins que la perte de son statut professionnel, c'est-à-dire peu ou prou sa disparition.


Un nouveau sponsor est apparu cet été sur le maillot des Nîmois


Cette figure de la communauté arménienne est tout sauf un inconnu dans le monde du poker. En effet, c'est lui qui avait racheté en 2010 le Cercle Concorde, club parisien fermé en 2007 pour cause de soupçons de blanchiment d'argent et de trop grande proximité avec le grand banditisme corse. Renommé Cercle Cadet, il n'aura pas fallu beaucoup de temps pour que les travers de la gestion précédente ne refassent jour. Serge Kasparian a en effet été mis en examen, toujours pour blanchiment, écroué puis placé en détention provisoire le mois dernier. Le cercle, lui, a été fermé le 14 octobre à la suite d'une perquisition spectaculaire de la brigade des jeux.




Dans les deux cas, ce mal endémique du jeu qu'est la triche, aura ruiné la réputation d'institutions potentiellement respectables, gâché le plaisir d'amateurs de jeu et de sport, et fait perdre leur emploi à un nombre significatif de salariés, victimes collatérales de la mégalomanie et du sentiment de toute-puissance d'une caste d'affairistes pour qui le respect et l'honneur s'avèrent au final n'être que des concepts très théoriques.

04/10/2014

L'ACF dans le viseur de Manuel Valls

104, avenue des Champs-Elysées; 200 employés dorénavant au chômage

Le 16 septembre dernier, la police a perquisitionné au petit matin le plus prestigieux cercle de jeu parisien, l'Aviation Club de France. Sur place, avenue des Champs-Elysées, les fonctionnaires ont confisqué une somme de 2,2 millions d'euros en liquide. Dix personnes ont été interpellées et quatre mises en examen pour travail dissimulé et abus de confiance, dont le directeur de l'établissement Marcel Francisci.

Ce dernier, actuel conseiller général Corse, est le fils d'un ancien gangster de la French Connection assassiné en 1982, par ailleurs lui aussi conseiller général Corse de son vivant. Ironie du sort : l'ACF est actuellement présidé par Charles Pellegrini, ancien directeur de l'antigang au sein de la Police Nationale.

 Marcel Francisci est également président de l'UMP en Corse du Sud

On prête à Manuel Valls, ex-ministre de l'intérieur, l'intention d'en finir définitivement avec les cercles de jeu parisiens, dont l'ACF est le septième qui se voit au moins temporairement fermé après les cercles Concorde (2007), Eldo, Haussman (2011), Wagram, Frochot et Clichy-Montmartre (2012). Une circulaire ministérielle particulièrement contraignante serait en préparation et remettrait en cause le statut associatif des cercles de jeu hérité du décret du 5 mai 1947, période où les résistants corses s'étaient vu confier la gestion de ces établissements. Le gouvernement souhaiterait transférer le marché parisien du jeu aux casinotiers, pour le moment interdits d'opérer dans Paris intra-muros.

29/06/2014

Mort de Joannes Strassmann


Le corps de Joannes Strassmann a été retrouvé sans vie vendredi 27 juin près de la rivière Ljubljanica en Slovénie, six jours après l'annonce de sa disparation. Si de nombreuses zones d'ombres subsistent, l'hypothèse d'un accident reste à ce stade privilégiée.

Agé de 29 ans seulement, résidant à Vienne, Johannes Strassmann faisait partie de la première vague de joueurs allemands ayant réalisé de grosses performances en tournoi. A l'origine joueur de Starcraft, il passa professionnel de poker en 2006 et réalisa l'essentiel de ses performance sur le circuit EPT entre 2007 et 2010. Sur la seule année 2008, il cumulera plus de 600,000$ de gain en disputant trois tables finales EPT: 6ème à Dortmund, 7ème à Londres, 9ème à Monaco. Un record.

Vue de la rivière Ljubljanica en Slovénie

A partir de 2010 il évoluera peu à peu vers le coaching, créant le site pokercoaches.com. Si Boris Becker fut son élève le plus médiatisé, sa plus grande réussite restera bien entendu le coaching de Pius Heinze, qui deviendra champion du monde WSOP en 2011. De retour depuis seulement quelques mois sur le circuit live, sa dernière performance sera une 50ème place obtenue, moins de deux mois avant sa mort, au Main Event de la grande finale EPT de Monaco. 

 Heinze, champion WSOP 2011. Son coach Strassmann en 3ème position à partir de la gauche.

Johannes Strassman restera dans l'histoire du poker comme un tacticien fin et élégant.